Dans le Grand Besançon, il existe une petite dizaine de mosquées. Rencontre avec les responsables d’une des plus anciennes de la ville, la mosquée As-Souna dans le quartier des Torcols

C’est une des plus anciennes mosquées de la ville, créée dans les années soixante quand les premières vagues d’immigration maghrébines sont arrivées à Besançon. Depuis 1994, l’association cultuelle As-Souna dispose de la plus grande mosquée du secteur, reconnaissable de loin avec son haut minaret blanc. À la tête de l’association qui gère la mosquée, Abdelrazak Boutouta. Il veille avec son conseil d’administration sur le bon fonctionnement de cette association dont l’objet est de faire vivre cette mosquée.

“Nous sommes 100 % autonomes financièrement, nous ne touchons aucune subvention, c’est la communauté des fidèles grâce à leur cotisation qui finance l’association et l’ensemble des travaux d’entretien ou d’investissement que nous faisons sur ce bâtiment” indique le président. Selon ses possibilités, chacun des adhérents verse entre 10 et 100 euros par mois à l’association pour assurer son budget.

Le président de l’association Abdelrazak Boutouta avec l’imam de la mosquée Fouad Fhaima.

Sur le plan religieux, la mosquée de la rue Avicenne est le principal lieu de culte musulman de Besançon. 250 à 300 fidèles assistent à la prière du vendredi., et en période de ramadan, la mosquée bisontine reçoit “entre 500 et 600 personnes à chaque office” note M. Boutouta. À la manœuvre, un imam présent ici depuis six ans, Fouad Fhaima, venu d’Algérie et désormais salarié de l’association depuis que l’État français a interdit la venue d’imams “détachés” payés par un pays étranger. “Le métier d’imam est désormais reconnu dans le Code du travail français” ajoute le président. Le religieux, qui traduit certains de ses prêches en français pour les fidèles qui ne seraient pas arabophones, est en train de valider son diplôme universitaire pour être en conformité avec les nouvelles règles en vigueur depuis quelques années en France, destinées à éviter toute forme d’entrisme religieux.

Une des difficultés de l’islam vient du fait qu’elle n’a pas de clergé, pas de hiérarchie comme c’est par exemple le cas pour la religion catholique. D’où le dialogue parfois chaotique par le passé. Depuis que le Forum de l’Islam de France (F.O.R.I.F.), lancé en 2022, est en place, le président de la mosquée As-Souna estime que “le dialogue est désormais permanent avec les services de l’État. Depuis 2018, le conseil français du culte musulman n’est plus l’interlocuteur de l’État, ce sont les A.T.I.F. qui le sont et les relations sont beaucoup plus directes et claires. Nous faisons tous société commune en France, il est important de poursuivre sans cesse le dialogue, avec les services préfectoraux, mais aussi avec les services de la Ville. Notre pays, c’est la France, nous sommes Français” ajoute M. Boutouta qui est également aumônier pour les patients musulmans de l’hôpital de Besançon. Deux autres aumôniers musulmans officient dans le Doubs, un pour les prisons, un autre pour l’armée.

Publicité - Boostez vos ventes grâce aux bons cadeaux ckdo.pro

La sécurité de leur lieu de culte reste une préoccupation. Dans les périodes électorales, ou pendant le ramadan, les risques peuvent être plus élevés. Dans l’ambiance de la dernière campagne présidentielle, fin 2021, les murs de la mosquée Souna et d’un autre lieu de culte musulman de Besançon avaient été souillés de tags à la peinture rouge représentant des croix de Lorraine. Un peu plus tôt, les mêmes croix de Lorraine avaient été peintes sur deux lieux de culte musulman du Haut-Doubs, à Pontarlier et à Montlebon. L’auteur des faits, cagoulé, avait pu être démasqué.

Dans ce contexte “zemmourien”, l’association bisontine s’était équipée de systèmes de vidéo-surveillance, extérieurs et intérieurs. Ses responsables sont en contact direct avec les forces de l’ordre pour dissuader toute tentative de récidive. “Les pratiquants de confession musulmane sont des citoyens comme les autres, nous ne devons rien lâcher face à ce genre d’actes et nous devons tous faire en sorte que notre pays s’en sorte par le haut” plaide Abdelrazak Boutouta qui se plaît à rappeler aux théoriciens du grand remplacement que dans la religion musulmane, tout prosélytisme est interdit. “D’où l’importance de poursuivre ces assises de l’islam, dans un dialogue constant avec la République.”