Destin

Nous l’avons connue jeune enseignante de français et de latin au lycée Edgar-Faure de Morteau. Puis adjointe aux affaires culturelles aux côtés de Jean-Marie Binétruy, alors maire de Morteau, avant de rapidement s’imposer comme l’élue en mesure de prendre la relève à la tête de la Ville. La députation était logiquement pour elle l’étape suivante. Elle succédera, là encore, à l’ancien maire de Morteau sur les bancs de l’Assemblée nationale, où son tempérament a rapidement pu s’épanouir.

Ce Palais Bourbon, elle en fera ensuite la tribune pour gagner en notoriété jusqu’à s’imposer comme la candidate légitime de son parti pour occuper une place de vice-présidente, puis première vice-présidente sous la première ère Macron. Depuis longtemps candidate, sans l’être, à un portefeuille ministériel, elle a eu la malchance de passer dès son arrivée au Palais Bourbon en 2012, l’intégralité de ses mandats successifs de députée dans l’opposition. Elle passera donc son tour, une fois en 2012, encore une fois en 2017, puis à nouveau en 2022 où sa famille de droite, passée tout près de la disparition, n’était plus que l’ombre d’elle-même à l’Assemblée.

La dissolution de juin dernier n’augurait pour elle rien de plus favorable, la droite parlementaire étant presque effacée des bancs du Parlement. Et pourtant, son heure, qu’elle attendait sans doute encore secrètement, est arrivée, à la faveur d’un improbable concours de circonstances dont seule la politique française a le secret. Annie Genevard, toute première ministre de l’histoire du Haut-Doubs, a peut-être atteint son Graal politique.

Mais à peine installée dans la belle demeure du ministère de l’Agriculture rue de Varenne, elle voit s’empiler depuis une semaine les lourds dossiers qu’elle aura à gérer dès son installation : fièvre catarrhale ovine, colère sourde des agriculteurs dont bon nombre des revendications qu’ils avaient brandies en janvier n’ont pas été satisfaites, lutte contre le réchauffement climatique et ses conséquences dans les cultures et sur les forêts, souveraineté alimentaire de la France à l’heure des accords de libre-échange, question épidermique du loup dans le massif jurassien notamment… Autant de questions brûlantes pour lesquelles le monde agricole attend des réponses.

La stature nationale d’Annie Genevard sera jugée à l’aune de ces multiples défis. Si elle parvient à les relever, le destin politique auquel la jeune élue mortuacienne se prenait à rêver à l’époque connaîtra peut-être alors d’autres étapes.

Jean-François HAUSER
Directeur de la rédaction

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