Avec un léger rictus, mi-empathique, mi-détaché, le président de la République a replongé les Français dans les affres d’un confinement qui ne dit pas son nom. Au pied du mur, il n’avait d’autre choix. Aveuglé par ses propres convictions qu’il avait pourtant su faire partager à une partie de l’opinion, y compris nous, le chef de l’État a fini par être contraint de reverrouiller le pays et perdu par là même son coup de poker du début d’année. Prenant des décisions politiques, louables certes car elles permettaient de maintenir à flot le moral des Français, il a négligé les décisions sanitaires. Ces tergiversations des dernières semaines lui coûteront sans doute de précieux points de popularité, peut-être même sa crédibilité à long terme. Mais ce n’est pas tant sa situation personnelle qui devrait le préoccuper, mais bien celle de l’économie française et du moral de ses concitoyens. Ce nouveau confinement peut-être inévitable risque pourtant d’être celui de trop. Bien que soutenue à un niveau sans doute inégalé dans tous les autres pays du monde, l’économie sous perfusion ne sortira évidemment pas indemne d’une année entière de soubresauts. Ce troisième confinement empêchera sans doute une reprise réelle de l’économie alors qu’on aurait pu espérer, pour peu que la vaccination ait suffisamment avancé d’ici l’été, miser sur un rebond assez rapide. Mais c’était sans compter sur cette troisième paralysie de la France qui met, encore plus que l’activité, la confiance des acteurs économiques à l’épreuve. Allons demander à un chef d’entreprise, aussi entreprenant, optimiste ou visionnaire soit-il, d’investir actuellement lourdement pour son développement alors que pend encore au-dessus de sa tête la lourde épée de Damoclès des prêts garantis par l’État à rembourser. Autre élément : les centaines de milliards d’euros injectés pour soutenir les secteurs sinistrés de l’économie ne provoqueront pas le retour immédiat de la croissance forte et durable, dans un pays qui était déjà avant la crise ankylosé par une dette publique gigantesque. Dans ce contexte à nouveau anxiogène, il n’est pas sûr non plus que notre pays soit à l’abri de dérapages sociétaux d’une partie de la population qui cumulent les conséquences d’une perte de repères sur le plan du travail, d’un sentiment d’étouffement lié aux restrictions de circulation, et parfois d’un vrai sentiment de déclassement. Si la deuxième partie de l’année risque d’être rude sur le plan économique, elle peut aussi s’avérer violente sur le plan sociétal. En tentant de jongler pendant des mois entre des décisions souvent contradictoires, le fameux “en même temps” si cher au président risque de finir par lui éclater à la figure. Cette explosion n’est pas pour autant ce qu’on doit souhaiter pour notre pays.
Jean-François HAUSER
Directeur de la rédaction
