Le ministère de la Transition écologique, de la Biodiversité, de la Forêt, de la Mer et de la Pêche a finalement donné raison aux défenseurs de la bécassine nicheuse qui ont obtenu la suspension de la chasse de cette espèce dans le Doubs et le Jura en attendant éventuellement que cela s’applique aussi dans le Cantal.
Faut-il différencier la bécassine des marais dont les effectifs ne sont pas en danger de la bécassine des marais nicheuse en France, pratiquement en voie d'extinction avec seulement une soixantaine de couples identifiés dont la moitié réside dans la vallée du Drugeon ? C’est l’objet même de la procédure engagée par la L.P.O. France qui demandait au tribunal administratif la suspension de la chasse à la Bécassine des marais dans le Doubs et le Jura. Tout est parti d’un travail effectué par Frédéric Giguet. Cet ornithologue, professeur au Muséum d’histoire naturelle de Paris est responsable d’un programme européen de suivi des habitats des espèces d’oiseaux chassables, Habitrack. Il était venu dans la vallée du Drugeon en 2024 équiper deux bécassines des marais de balises. La première a disparu le jour même de l’ouverture de la chasse et la seconde un mois plus tard. Frédéric Giguet était de retour en Franche-Comté en avril dernier pour présenter les résultats de ses suivis et fait part de son inquiétude pour la survie de la population nicheuse de bécassines des marais dans le Drugeon. Il en reste tout au plus une trentaine de couples.

Cette réunion s’est déroulée en présence des représentants de la Fédération de chasse qui ont vivement contesté le diagnostic établi par l’ornithologue. Ils se sont même montrés assez arrogants et méprisants à son égard sans apporter des arguments tangibles, rappelle Bernard Marchiset, le président de la L.P.O. Franche-Comté. Après cette réunion houleuse, les membres de la L.P.O. Franche-Comté ont échangé pour choisir finalement d’engager une action en justice en faisant appel à L.P.O. France qui a sollicité son avocat. La demande de suspension dans le Doubs et le Jura concerne également la Bécassine sourde, espèce voisine très difficile à différencier en situation de chasse. On a très peu de données sur cette espèce. A priori une centaine de bécassines sourdes passent en France. Cette espèce est en danger critique selon l’Union internationale pour la Conservation de la nature. Au niveau international, ces deux espèces de bécassines ne sont pas en danger, reconnaît Bernard Marchiset.
Le discours est très différent du côté de la Fédération de chasse qui avait déjà retardé d’un mois l’ouverture de la chasse à la Bécassine des marais. On a aussi posé un Prélèvement Maximal Autorisé sur la bécassine des marais pour maîtriser les effectifs prélevés. On parle de chasse adaptative, explique Jean-Maurice Boillon, le président de la Fédération de chasse du Doubs. Des mesures jugées insuffisantes par la L.P.O. Franche-Comté.

Bien consciente que la dégradation des habitats est la cause principale de l’effondrement de cette population, elle estime que la chasse a aussi un impact. La situation est très critique. On est proche du seuil critique de disparition de cette population nicheuse. En plus de la décision du tribunal administratif, on demande la mise en place d’un moratoire pour interdire durablement la chasse des bécassines dans les départements français accueillants les derniers couples nicheurs : Doubs, Jura mais aussi Cantal et Aveyron.
La L.P.O. demande aussi que des actions soient entreprises pour restaurer les habitats et davantage de transparence dans la publication des prélèvements d’oiseaux sauvages. Le tribunal administratif de Besançon a suspendu le 29 août les arrêtés préfectoraux de la chasse à la Bécassine des marais dans le Doubs et le Jura. Ces suspensions réactivaient alors l’arrêté ministériel autorisant la chasse à la bécassine. À ne plus rien y comprendre. La L.P.O. est repartie au combat judiciaire. La bonne nouvelle, c’est que le ministère a suspendu son arrêté pour le Doubs et le Jura où la bécassine des marais ne sera pas chassable cette saison. Un recours a été engagé par L.P.O. France pour que cette décision s’applique aussi pour le Cantal.