À quelques mois des élections municipales de mars 2026, c’est comme un nouveau sentiment de mépris qu’éprouvent les maires des petites communes rurales. En effet, à partir du prochain scrutin municipal, les communes de moins de 1 000 habitants seront soumises au même régime électoral que les plus grandes, c’est-à-dire qu’elles devront présenter des listes complètes (7 conseillers municipaux ou plus en fonction de leur nombre d’habitants) et également des listes paritaires, c’est-à-dire comprenant autant d’hommes que de femmes. Si certains maires se disent favorables à ce nouveau système, de nombreux autres à qui nous donnons la parole dans ce dossier dénoncent une nouvelle fois une mesure tombée d’en haut, sans concertation préalable.
La réforme du mode de scrutin divise les petites communes
Dès les prochaines municipales, les communes de moins 1 000 habitants devront adopter le mode de scrutin de liste paritaire. Cela signifie la fin du panachage et l’obligation de listes complètes. Le sénateur Longeot interpelle le Premier ministre.
Pour Jean-François Longeot, qui se fait le relais de nombreux maires de petites communes rurales, cette réforme adoptée en mai dernier et qui doit entrer en action dès les prochaines élections municipales des 15 et 22 mars 2026, est beaucoup trop prématurée. Alors que la plupart des maires attendaient l’adoption de la très attendue réforme du statut de l’élu local, c’est un changement du Code électoral qui est imposé aux plus petites communes.
Fini donc les listes incomplètes et la possibilité de rayer des noms. Place aux listes complètes et qui respectent la parité hommes-femmes. Jean-François Longeot a fait part au Premier ministre Sébastien Lecornu de son opposition à cette réforme du scrutin, voyant là « un dispositif manquant de pragmatisme et de bon sens, susceptible de fragiliser l’équilibre et la proximité qui fondent la force de nos conseils municipaux » avance le parlementaire doubien. « Cette loi est trop précipitée. Je ne suis pas contre son principe, mais elle arrive trop brusquement, je pense qu’il serait plus raisonnable de l’appliquer aux municipales suivantes, c’est-à-dire en 2032. je rencontre tous les jours des maires qui se demandent comment ils vont faire » poursuit M. Longeot.
Pour étayer ses propos, il prend un cas concret. « Dans un conseil municipal de 11 personnes qui comprend 9 hommes et 2 femmes, il faudra donc que 3 hommes se retirent Dans ce cas, on fait quoi ? On tire à pile ou face ? Et ceux qui sont exclus risquent de monter une liste concurrente. » Le sénateur Longeot pointe aussi le risque « de faire augmenter l’abstention ou d’invalidation des bulletins car je pense que des électeurs vont vouloir continuer à rayer des noms. »
Et en cas de présence de deux listes, dans les petites communes où souvent il n’y en avait qu’une mais avec un nombre plus important de candidats que nécessaire, « on risque de semer des clivages et de la politique là où elle n’est pas nécessaire » poursuit M. Longeot qui voit derrière cette réforme une manière pour le législateur de montrer qu’il y a trop de communes à son goût au cas où certaines peineraient à constituer une liste complète et paritaire.
Mais à moins d’un énième revirement du législateur, ou d’une nouvelle instabilité politique qui décalerait les municipales, cette réforme s’appliquera bel et bien dès les prochaines élections municipales de mars 2026. Elle est censée répondre à la crise de l’engagement local tout en renforçant la parité. Cette harmonisation du mode de scrutin vise officiellement un triple objectif : garantir la vitalité démocratique, la cohésion municipale et la parité.

L’un des objectifs avoués, au-delà de l’harmonisation et de la simplification des modes de scrutin, est de répondre à la crise de l’engagement local. En particulier dans les petites communes rurales, qui n’étaient jusqu’ici pas soumises à des obligations de parité et où on observait une présence féminine relativement faible (37,4 % selon les derniers chiffres ministériels, contre 48,1 % dans les communes de plus de 1 000 habitants, obligées d’appliquer l’alternance dans la constitution des listes depuis 2014).
La mise en place de cette réforme pourra cependant être assouplie. Là où le nombre de candidats à élire est actuellement de 9, il pourrait être baissé à 7 par exemple pour ne pas entraver le processus démocratique. Il restera en effet cette possibilité de déposer des listes incomplètes avec deux candidats de moins que l’effectif légal : soit un seuil minimal de 5 candidats dans les communes de moins de 100 habitants (9 jusqu’à 499 habitants et 13 jusqu’à 999 habitants). Les partisans de cette réforme sont confiants dans la capacité à mobiliser des femmes, y compris dans les plus petits villages où elles sont souvent déjà impliquées dans la vie associative. À l’échelle du pays, cette réforme touche 70 % des communes, pour seulement 13 % des habitants.
