Dans le Doubs, comme au niveau national, les demandes d’hébergement des sans-abri sont en constante augmentation. Face à cette situation, les places sont insuffisantes. Et c’est tout le système qui devrait permettre le retour à un logement digne qui s’engorge.
Emmanuel Macron l’avait annoncé en 2017, année de son premier mandat en tant que président : “Plus personne dans la rue à la fin de l’année.” Près de 8 ans plus tard, force est de constater que la promesse n’a pas été tenue. Si des moyens ont effectivement été débloqués et deux plans quinquennaux “Le logement d’abord” mis en place, le nombre de sans-domicile fixe a plus que doublé en France en dix ans. Selon la Fondation pour le logement des défavorisés (anciennement fondation Abbé Pierre), 330 000 personnes sont considérées en 2024 comme sans domicile fixe, soit sans abri, en habitation de fortune, en hébergement collectif, à l’hôtel, dans les centres d’accueil de demandeurs d’asile ou hébergés en logement associatif.

Dans le Doubs, une file active de 200 sans-abri est estimée à Pontarlier (c’est-à-dire 200 passages sur une année), et environ 150 personnes sont en très grande précarité simultanément à Besançon (sur un file active de 700 dans l’année). Les chiffres du 115, géré par le S.I.A.O. 25 (service intégré d’accueil et d’orientation) sont éloquents : en 2024, 13 186 appels ont été traités. 77% de ces appels ont été suivis par une mise à l’abri, en abri de nuit, à l’hôtel ou vers un dispositif d’hébergement d’urgence. 23 % n’ont pas abouti, pour la plupart (près de 600 sur 1 128) par manque de places.

Face aux demandes croissantes, le manque de places disponibles se fait de plus en plus criant. Avec 213 places d’hébergement d’urgence (207 places ouvertes selon la préfecture), le Doubs figure en bas du tableau en comparaison avec les départements de même population. Conséquence : le système s’engorge et arrive à saturation. “Le phénomène est national mais il est nouveau dans le Doubs et notamment à Besançon. L’accès au logement est devenu compliqué avec un manque à Besançon et dans le Haut-Doubs, notamment de logements sociaux”, relève Philippe Cholet, administrateur du G.C.S., groupement de coopération sociale. La structure rassemble une vingtaine d’associations et de C.C.A.S. dans le département et porte entre autres le S.I.A.O. “Or, notre objectif est de faire rentrer le public avec lequel nous travaillons dans les dispositifs de logements (hébergements d’urgence, C.H.R.S., logement adapté), reprend-il. Mais l’accès au logement étant bloqué, les personnes dans les dispositifs d’insertion arrivent difficilement à entrer dans un logement classique. Donc les dispositifs arrivent à saturation, les gens ne sortent plus des dispositifs d’insertion. C’est une situation nouvelle qui ne fait que s’approfondir.”
À Besançon, 48 personnes sont en attente permanente d’un hébergement depuis plus de six mois. Les abris de nuit et hébergement d’urgence sont saturés à 86% pour les hommes, 85% pour les femmes. Dans le Haut-Doubs, les 10 places d’hébergement d’urgence affichent une occupation constante de 100%. “Les gens ont tendance à ne plus appeler le 115, déplore Philippe Cholet. Le dépannage immédiat sont les places hôtelières. Il y a un intérêt à court terme mais cela reste insuffisant avec un public fragile qui a besoin d’un accompagnement. Et l’hôtel coûte très cher en plus.”
Fort de ce constat, le G.C.S. a interpellé le préfet demandant l’attribution de 160 places supplémentaires d’hébergement d’urgence : 100 à Besançon, 30 dans le Haut-Doubs, et 30 à Montbéliard. “La question est réelle, a réagi le Préfet Rémi Bastille. Le Doubs est assez peu doté en hébergement d’urgence avec un taux d’occupation très élevé. J’ai porté cette problématique au niveau du préfet de Région et le travail est engagé sous l’égide de la D.R.E.E.S.” Il l’assure : une réponse devrait arriver rapidement…
