Affront

Loin des soubresauts de la vie politique parisienne et du spectacle affligeant offert par la plupart des partis - L.R. en tête - dans un psychodrame qui pourrait être haletant s’il ne jouait pas avec l’avenir des Français et la crédibilité du pays, les maires des petites communes ont bien d’autres préoccupations. L’assemblée générale de l’association des maires ruraux du Doubs le 8 novembre devrait confirmer la tendance avec des maires qui continuent à ployer sous la charge des responsabilités et qui estiment que l’État les méprise. Dernier épisode en date : la réforme du mode de scrutin qui s’appliquera dès les prochaines élections municipales en mars 2026 aux communes de moins de 1 000 habitants.

Jusqu’à présent, dans ces communes rurales, les candidats aux élections pouvaient constituer des listes incomplètes, ou alors comportant plus de noms que le nombre de conseillers municipaux nécessaire, et n’avaient pas l’obligation de trouver autant d’hommes que de femmes pour boucler leurs listes. Les électeurs, eux, avaient la possibilité de panacher les listes, c’est-à-dire sélectionner celles et ceux qui à leurs yeux avaient les meilleures capacités pour faire le job. Dorénavant, ces très petites communes - largement majoritaires en nombre -, seront soumises au même régime électoral que les plus grandes, c’est-à-dire avec des listes qui doivent être complètes et qui soient paritaires, avec autant de femmes que d’hommes.

Si la parité et l’encouragement des femmes à s’engager en politique est évidemment à saluer, dans la réalité, les maires (qu’ils soient femmes ou hommes d’ailleurs) craignent de ne pas pouvoir boucler leurs listes. À quelques mois du scrutin, certains s’arrachent déjà les cheveux pour trouver assez de candidats, et suffisamment de femmes. Cette réforme, imposée d’en haut par le législateur, est accueillie par beaucoup de maires ruraux comme un nouveau coup dur et une entorse à leur légitimité, comme une nouvelle tentative d’immixtion dans la bonne gestion de leurs petites collectivités, comme un nouvel affront.

Ce nouvel épisode vient encore aggraver la défiance qui s’est installée entre Paris et la ruralité. Avant cette réforme hâtive du mode de scrutin, les maires ruraux, corvéables à merci, avaient d’autres demandes légitimes : celle d’un véritable statut de l’élu local qui attend, elle, dans les cartons depuis plusieurs années. Les maires ruraux sont las.

Jean-François HAUSER
Directeur de la rédaction

Le blog d'actu de La Presse Bisontine, La Presse Pontissalienne et du journal C'est à dire