À Fontain, la ferme du bout du Bois a instauré la vente directe de sa viande de cochons et charcuterie dès 2001, d’abord à Besançon, puis à la ferme. Précurseuse dans le circuit court, l’exploitation favorise aussi l’économie circulaire.
Il est fraîchement retraité, mais Roland Bulloz reste encore dans les parages à la ferme du bout du Bois à Fontain. Il continue de donner un coup de main à ses deux fils, Louis et Élie, qui ont repris tous les deux, l’exploitation de cochons et la vente directe. La viande et la charcuterie de “Chez Bulloz”, comme les clients aiment l’appeler, a su tracer son chemin dans le cœur et le ventre des consommateurs. Et ce depuis 2001, des années avant que le circuit court et les produits fermiers ne reviennent sur le devant de la scène. “On n’a rien inventé, on a tout détruit et maintenant ça revient”, énonce simplement Roland.
En s’installant en 1994 à la ferme du bout du Bois, après avoir été professeur en zootechnie au lycée à Dannemarie et à Châteaufarine, le gamin qui a grandi dans une ferme urbaine de Besançon dans les années 1960 à Saint-Claude, revient en quelque sorte aux sources. “Je suis né dans une ferme à Besançon qui faisait un peu de lait, de maraîchage, des œufs, destinés à la vente directe. J’ai vu l’évolution à Saint-Claude, il y avait au moins 5 boucheries. Puis la première grande surface est arrivée. Tous les petits commerces se sont effilochés. Ma génération a vécu la fin des petites fermes.”
Nourri par cette expérience familiale, Roland Bulloz ouvre dès 2001 une boutique de vente directe à Rivotte. Les mêmes années, il répond à plusieurs commandes des institutions pour des buffets fermiers, contribuant à faire connaître ses produits. En 2015, il vend la boutique à Rivotte et en ouvre une à la ferme. “C’était compliqué au début, les banques ne voulaient pas prêter de l’argent, on a vraiment galéré, se souvient Roland qui ne lâche pas l’affaire, aidé par son épouse. C’est aussi grâce aux enfants, sans eux, on n’aurait pas pu continuer.”

La ferme Bulloz, qui reste seule sur le Grand Besançon dans son domaine, élève 400 cochons qu’elle engraisse et qu’elle transforme ensuite en charcuterie. “70 % de nos produits viennent de la ferme, le reste (miel, vin, bière, poulet, etc.) provient d’autres producteurs du coin. 400 clients par semaine se déplacent à la ferme pour acheter saucisses, terrine, rillettes, saucissons, etc. “On est très transparents, tout le monde peut venir voir l’élevage, ce qu’on donne à manger à nos cochons”, reprend Roland.
Valorisant l’économie circulaire et de proximité, les Bulloz nourrissent les bêtes avec le petit-lait de la fromagerie de Fontain, et des biscuits impropres à la consommation de chez Cornu et Buhler. Le fumier part chez un agriculteur céréalier de Charnay. En échange, ils rachètent de la paille pour les cochons. La ferme Bulloz est aussi partie prenante dans un projet bisontin de méthanisation à partir de déchets verts et agroalimentaires dont son fumier pour alimenter le réseau de gaz.
“On gagne en qualité et en régularité”, souligne Roland. Pour autant, la relève ne se repose pas sur ses lauriers. Les deux nouveaux gérants fourmillent de projets. Une gamme de charcuterie zéro nitrite est en cours d’élaboration. À ne pas confondre avec le “sans nitrite”, que l’on peut trouver chez les industriels, précise Élie. “Le sel nitrité est utilisé pour la conservation et la couleur rose de la charcuterie. Quand il est noté sans nitrite, du jus de légume est utilisé à la place, mais ça se transforme ensuite en nitrite. Nous, on en utilise très peu, mais on veut pousser encore plus cette qualité avec zéro nitrite.”
Le père et le fils balaient en même temps l’idée d’un label. “On n’en a pas besoin, on a instauré une relation de confiance avec nos clients, ajoute Roland. Tout ça donne un sens au métier de paysan.”