Ils veulent aussi contrecarrer le discours ambiant consistant à vouloir stigmatiser les entrepreneurs. Ces représentants des P.M.E. industrielles locales ne cachent plus leur exaspération
Leur parole est assez rare pour être écoutée. Sera-t-elle entendue ? C’est une autre question. Les représentants de la filière métallurgie de la région - soit 60 % des emplois de l’industrie - montent au créneau, appuyés par la présence du délégué national de l’U.I.M.M. Hubert Mongon, venu il y a quelques jours à Besançon tenter de porter la bonne parole des entrepreneurs. “Des secteurs de l’industrie s’en sortent bien, c’est le cas de l’aéronautique, de l’énergie, de la défense. D’autres souffrent beaucoup en ce moment, comme l’automobile et le machinisme agricole. Des nuages s’accumulent actuellement dans une ambiance générale qui n’est pas toujours favorable aux entrepreneurs et une incertitude politique qui pèse sur le moral. Nous sommes là pour dire notre exaspération car dans ce contexte incertain, s’il y a un îlot de stabilité, c’est bien l’entreprise. Laissons aux entrepreneurs la liberté d’entreprendre et de travailler !” est venu plaider le patron de l’U.I.M.M. aux côtés de ses collègues des quatre départements francs-comtois.
Trois thématiques préoccupent les chefs d’entreprise actuellement : le système productif français beaucoup trop entravé selon ces dirigeants, le poids de la protection sociale dans l’endettement, et la question du fonctionnement du marché du travail avec un taux de chômage chez les jeunes qui atteint 18 %. Jean-Luc Quivogne, le président de l’U.I.M.M. Franche-Comté embraye : “Nous sommes évidemment pour pérenniser le système de redistribution tel qu’il existe en France, mais avant de redistribuer, il faut pouvoir créer de la richesse et ce sont bien les entreprises qui créent de la richesse, pas l’État. On veut faire passer le message qu’entreprendre en France, ce n’est pas un gros mot, et ça a encore du sens !”

Tous ces responsables de P.M.E. s’offusquent de l’amalgame qui existe actuellement entre la grande majorité des entreprises qui peinent à dégager de la marge et les barons du C.A.C. 40 qui ne jouent pas dans la même cour. “Je rencontre tous les jours des patrons qui ne se payent pas certains mois parce que leur entreprise ne dégage pas suffisamment de trésorerie” ajoute Hubert Mongon dont les débats tronqués sur les aides aux entreprises ou la taxe Zucman font également bondir. “On avance des chiffres farfelus de 211 milliards d’euros d’aides publique, cette somme est l’empilement de dizaines de mesures d’aides qui n’ont rien à avoir avec le soutien aux entreprises. Il suffit de prendre connaissance de la dernière étude détaillée présentée par France Stratégie pour vérifier. On demande juste un peu d’honnêteté intellectuelle” ajoute le représentant national.
Les industriels locaux se sentent sous tension et ont tenu à le faire savoir. “Dans la plupart de nos entreprises, la visibilité moyenne est d’à peine deux semaines en ce moment pour nos carnets de commandes. Difficile d’être serein” ajoute M. Quivogne. Le Pontissalien Damien Tournier, président de l’U.I.M.M. du Doubs et par ailleurs patron de Schrader Pacific à Pontarlier est confronté tous les jours à ces problématiques dans un secteur automobile européen bien à la peine. Dans un secteur situé à quelques kilomètres de la frontière suisse où là-bas, quand un salarié en Suisse perçoit 2,2 à 2,3 fois le salaire d’un salarié français pour le même poste, le coût pour l’employeur suisse est à peine de 15 % supérieur, à cause du différentiel de taxes entre le système français et le système helvétique. “Nous voulons continuer à travailler, à avancer, à innover, il faut juste qu’on nous en laisse la possibilité” plaide l’industriel pontissalien.
