Dès 2009, le C.A.U.E. (conseil d’architecture d’urbanisme et de l’environnement) du Doubs offrait au travers d’une exposition des pistes de réflexions sur la manière d’habiter autrement. Avec une remise en cause du pavillon individuel. 15 ans plus tard, cette exposition reste d’actualité.
Raréfaction du foncier qui devient de plus en plus cher, densification des quartiers, loi Zéro artificialisation nette… Aujourd’hui, construire une maison individuelle relèverait presque d’une utopie. Toujours plébiscité par les habitants, ce modèle est pourtant remis en question, et depuis plusieurs années.
Depuis plus de 50 ans, la maison individuelle semble s’imposer comme la référence en matière d’habitat : plusieurs études concluent que ce type d’habitat est le rêve de tous les Français. Mais ce modèle est-il réellement adapté aux besoins et aux évolutions de la société : personnes seules, jeunes ménages, couples vieillissants, familles monoparentales ou recomposées ?… Peut-on vraiment répondre à ces différents besoins en logement avec un seul type d’habitat ?, soulève ainsi le C.A.U.E. Comme l’explique Sophie Némoz, sociologue de l’habitat (voir en page 37), le logement s’individualise et se pluralise. Or, le pavillon individuel ne peut répondre à cette pluralisation.

Par ailleurs, à l’heure où les considérations environnementales sont mieux prises en compte dans la façon d’habiter, la maison individuelle induit un impact sur l’environnement. Chaque année, plus de 60 000 hectares sont soustraits à l’agriculture pour être urbanisés, dont près de la moitié pour l’habitat. Cette consommation de territoire augmente plus vite que la population, soulignait déjà le C.A.U.E. dès 2009. Aujourd'hui, la loi Z.A.N. (lutte contre l’artificialisation des sols) a été votée avec pour objectif de réduire de moitié, dans un premier temps, la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers d’ici à 2031.
Autre argument d’impact sur l’environnement : le recours à la voiture pour les trajets domicile-travail-loisirs se démultiplie. En cause : un éloignement des centres urbains pour des terrains moins chers. Le C.A.U.E. questionne aussi le bouleversement des paysages dû à l’urbanisation pavillonnaire. Une rupture s’opère avec le village ancien par l’implantation, l’organisation, le rapport au site, les constructions. Alors que tous les villages sont différents, leurs nouveaux quartiers se ressemblent. Le lotissement est devenu une forme de quartier stéréotypé : des rues en impasse qui desservent des parcelles de même taille avec une maison au milieu.

Un appauvrissement des espaces publics où chacun se retranche derrière sa haie et des habitats standardisés, choisi sur catalogue, sont soulignés, souvent au détriment de la qualité de l’architecture : absence de relation au terrain et au site, manque d’organisation des espaces intérieurs…, déplore le C.A.U.E.
Face à ces constats pas toujours très optimistes, plusieurs exemples montrant d’autres façons d’habiter sont mis en lumière. Dans le Haut-Doubs, le hameau de Chaon est cité, avec le programme élaboré par l’architecte Joël Laffly dès 2000, comprenant 5 maisons et garages ainsi qu’une salle collective. Ce hameau se situe sur une pente, à la lisière d’un bois, face au lac de Saint-Point. Les maisons s’organisent en deux rangées. Elles sont desservies par des allées piétonnes. Chaque chalet est accessible par le niveau haut, où se trouve la pièce de vie. Celle-ci offre une large vue sur le lac par une terrasse. L’organisation, l’implantation et le gabarit des constructions respectent le terrain naturel. Cela participe à l’intégration du projet dans le paysage et offre une vue à chacun, explique le C.A.U.E.
Autre exemple dans le Grand Besançon, à École-Valentin. Un ancien établissement industriel a été restructuré en 8 lofts par l’architecte Richard Garcia. Il comporte deux corps de bâtiment, souligne le C.A.U.E. Le premier volume, vers l’entrée sur rue, a été conservé pour accueillir le stationnement automobile. Le second a été réhabilité pour recevoir des logements spacieux en duplex. Ceux-ci donnent sur de larges terrasses en bois qui remplacent les anciens quais de chargement. Une piscine collective clôturée participe à la vie de la copropriété.
Au-delà du pavillon individuel, l’habitat collectif peut aussi avoir du charme et du caractère.
