Autour du tiers lieu Le 97 (97, rue Battant), une autre façon d’aborder les problèmes du quartier a été initiée. En travaillant “par le bas.” Prochain atelier de discussions le 15 mai.
Bruit et violences sur le square Bouchot, regroupements bruyants esplanade de la Madeleine, salle Battant fermée et délabrée, bennes à cartons trop souvent pleines, sensation générale d’entrer dans un quartier dégradé quand on vient de la Boucle… Tous ces sentiments, mais aussi les points positifs, ont été clairement exprimés par les habitants de Battant, grâce à l’initiative lancée par le tiers lieu Le 97 et son animatrice Christine Dornier après les crispations ressenties par de nombreux résidents l’été dernier. « L’an dernier, j’ai passé mon été à ne pas pouvoir dormir la nuit tellement il y avait de bruit et de nuisances dans le périmètre du square Bouchot » se souvient Christine Dornier. L’idée lui vient alors de réunir tous les acteurs du quartier : habitants, commerçants, travailleurs sociaux, services de la Ville, police, gens de la rue… pour tenter de discuter tous ensemble et trouver des solutions d’apaisement. Mais elle ne voulait pas d’une énième réunion publique comme les autres.
Dans sa démarche, elle a donc fait appel à Alexandre Moine, un chercheur et professeur des universités bisontin rattaché au laboratoire Théma qui travaille depuis plusieurs années à analyser la structuration des quartiers prioritaires de la ville (Q.P.V.) à travers des travaux qui l’ont amené à Brest, Saint-Étienne et Montpellier notamment. « Mes méthodes de travail sont basées sur des outils de diagnostic territorial “par le bas”, c’est-à-dire en partant des gens qui vivent et travaillent sur le terrain. Pour ne pas que ces discussions n’aboutissent à rien de concret, je cartographie les ressentis et mets tout cela en graphes pour que chacun puisse visualiser ce tissage » explique Alexandre Moine.
Un premier atelier de discussion basé sur cette méthodologie a réuni fin août 2024 une bonne trentaine d’acteurs du quartier, âgés de 14 à 84 ans. Il a été suivi d’un deuxième, puis d’un troisième atelier et bientôt, le 15 mai, aura lieu un quatrième atelier d’échanges consacré aux enjeux du quartier.
Bien loin des polémiques qui alimentent l’actualité du quartier, ce travail en profondeur doit aboutir à trouver des solutions, souvent simples mais concrètes, à mettre en œuvre pour améliorer la tranquillité publique et le bien vivre ensemble. « Nous sommes dans la démarche inverse de certains qui veulent mettre de l’huile sur le feu. À travers ce travail, l’idée est de dire ce qui ne va pas, ce qui va bien aussi. C’est de faire une photographie précise de ce quartier. Après, il faudra que cette photographie devienne un film » image Alexandre Moine. Les initiateurs de cette action ont souhaité qu’un maximum d’acteurs soient impliqués dans la démarche, y compris dans le domaine de la santé avec l’implication par exemple de Julien Legrain, infirmier médiateur santé pour Battant.

Pour rendre concret ce travail en profondeur, Alexandre Moine s’apprête à éditer et afficher au mur du 97, des cartes en format poster qui ciblent, avec des points verts, rouges ou noirs, les points de crispation ou de satisfaction. Des pastilles que les acteurs du quartier eux-mêmes seront amenés à bouger ou à changer de couleur quand un problème survient ou trouve sa solution. « Les solutions à certains problèmes sont parfois très simples à mettre en œuvre et ne nécessitent aucun battage médiatique ou politique. Exemple : si des habitants ont ciblé telle portion de rue où ils déplorent de fortes odeurs d’urine, peut-être qu’il suffira que la Ville passe nettoyer deux fois par semaine au lieu d’une et le problème sera résolu, sans bruit » poursuit le spécialiste.
Cette méthode de travail « par le bas » est inédite ici. Après avoir posé et visualisé les enjeux du quartier lors du prochain atelier mi-mai, il sera néanmoins nécessaire que les autorités municipales s’emparent de ce travail de terrain pour appliquer des décisions concrètes. Cette méthode scientifique prônée par le géographe bisontin s’appelle de l’intelligence territoriale. Elle est destinée à « faire territoire commun ». Une expression qu’on entend souvent dans la bouche de la maire Anne Vignot. À Battant, la méthode venue de la base sera-t-elle payante ?